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Photo du rédacteurJohn Kofi

A propos du consentement...

Dernière mise à jour : 9 oct. 2022

... et de l’éducation par les sports collectifs.



En ces temps confinés où la règle d’or de l’Ultimate “éviter le contact” n’a jamais été aussi bien respectée, je voulais en profiter pour exprimer ce que je trouve être une excellente leçon sur le consentement et plus largement sur l’éducation à travers les sports collectifs.


Screenshot de l'application mobile WFDF Ultimate Rules


La première règle de l’Ultimate est : il est interdit de toucher son adversaire. Et ceci de manière très stricte. Poser la main ou le bras contre un jouer est considéré dans le règlement comme une violation claire (annotation 12.5). Pourtant, dans un match de haut niveau, où tout le monde connaît les règles et où l’intensité physique et le l’Esprit du Jeu sont à leur maximum, il n’est pas rare de voir de nombreux contacts entre les joueurs.euses, pas toujours accidentels, pas spécialement dangereux mais des contacts tout de même. Alors comment être cohérent dans l’image de notre sport quand les observations contredisent d’emblée sa première règle ?

La deuxième règle de l’Ultimate est : c’est un sport auto-arbitré. Indéniablement ce qui fait de l’Ultimate un sport si particulier voire impensable pour certains. Avec une petite précision : c’est la personne qui subit la faute ou l’infraction qui se doit de le faire remarquer, arrêter le jeu si nécessaire et imposer à l’adversaire un jeu sain et respectueux. Autrement dit, il n’y a pas de faute tant que la personne concernée, qui connaît les règles, n’appelle pas la faute. C’est là toute la subtilité de l’auto-arbitrage et, au sens large, de l’Esprit du Jeu : la nuance, la tolérance et la cohérence d’un.e même joueur.euse.

On pourrait donc résumer ces deux règles par : Il est interdit d’initier un contact qui pourrait être dangereux pour l’adversaire ou de le/la toucher sans son consentement.

Moi qui aime jouer des épaules et sentir mon attaquant même sans le voir, comment savoir s’il consentira à ce style de jeu sachant que par défaut, je n’ai pas le droit de le faire.

· Premièrement, il y a la possibilité d’en discuter collectivement avant le match, d’où l’un des intérêts du pré-huddle (ronde d’avant match), ou individuellement sur la sideline ou même sur le terrain. Ex : “Est-ce que ça vous dérange si on joue avec cette intensité physique ?”

· Deuxièmement, observer l’adversaire et apprendre à le connaître. On peut aisément tirer des conclusions, ou du moins soupçonner quel style l’adversaire a l’habitude de jouer, que ce soit en regardant de précédents matchs s’il y en a, en interrogeant les joueurs qui ont déjà côtoyé cette équipe, en observant la carrure et l’aisance des joueurs.

· Troisièmement et après mûre décision, sur le terrain, voir comment réagit l’adversaire à cette pression physique.


Deux adversaires d'Ultimate consentants au contact à l'épaule. WU24 2019


C’est important de rappeler que par défaut la règle stipule que le contact est interdit, par conséquent, au moindre signe d’inconfort de la part d’un joueur qu’il faut pouvoir écouter, il faut prendre en compte que la base du consentement est “non c’est non !”.

Le parfait exemple nous est apporté par l’équipe belge des Flying Rabbits Ultimate Club - Brussels qui en 2018 a participé aux Championnats du Monde des Clubs, à Cincinnati. Ils ont clairement et respectueusement communiqué à leurs adversaires qu’ils joueraient avec une tolérance zéro sur les contacts, et ça n’a posé aucun problème, au contraire, puisqu’ils ne sont pas repartis les mains vides.

A propos du Spirit à partir de 4:00


Voilà ce que j’aime avec l’Ultimate mais surtout avec l’Esprit du Jeu, voilà ce qui fait de ce sport et ses règles une philosophie applicable à la vie de tous les jours et qui pourrait - je l’espère - rendre le monde un peu meilleur.


[N’hésitez pas à relire toute cette première partie et imaginer l’adversaire comme un.e possible partenaire sexuel.le, puisque le consentement, c'est ça aussi]


La question de consentement est posée à tous les âges, à tous les sexes. Voir l’Ultimate comme une analogie de nos relations plus intimes pourrait donc être un excellent moyen de former les jeunes générations à répondre à cette question qui fait aujourd’hui encore bien trop de victimes.


A propos de l’éducation ...


Lorsque je parle d’Ultimate en soirée et que la discussion vient à s’élargir, j’aime philosopher et poser la question “Qu’est que l’on veut apprendre à nos enfants ?”. Les sports font partie intégrante de notre éducation et façonnent notre vision du monde. Nous sommes dès le plus jeune âge influencés par nos coachs, entraîneurs et autres Senseï. Mais quelles leçons sont tirées des sports les plus pratiqués ?

Commençons par le football, - puisqu’il compte environ 300 millions de licenciés dans le monde dont 2 millions rien qu’en France - il n’est pas rare d’y voir des fautes “stratégiques” qualifiées même “d’intelligentes”, qui ont pour seul objectif d’empêcher l’adversaire d’avancer à notre désavantage ou simplement de marquer. On se rappelle la main de Luis Suarez contre le Ghana en quart de finale de la Coupe du Monde de Football 2010. Gagner le match semble avoir surpassé le respect des règles, et les joueurs sont habitués, voire formés, à ruser l’arbitre, seule autorité sur le terrain. Une joueuse universitaire me racontait avec un naturel déconcertant : “sur les touches, on leur met une olive pour les faire déjouer, c’est comme ça, ça ne se voit pas et ça marche” (je paraphrase un peu mais l’idée y est), ou quand la ruse pour gagner se rapproche étrangement de l’agression sexuelle. Sans vouloir totalement dénigrer ce sport qui a également sa dose de bienfaits, allant de la créativité à l’esprit d’équipe, comment ne pas se dire que quelque chose ne va pas, fondamentalement, dans ce que le football nous apprend. L’exemple le plus récent qui a fait parler de lui est cette faute à la dernière minute de la finale de la Super Coupe d’Espagne cette année, qui a une nouvelle fois moralement déchiré la communauté avec la question “Est-ce qu’il a bien fait de faire cette faute ?”

https://www.youtube.com/watch?v=Dmp1fpKkDXk


Au handball, la situation est un peu différente, il y a - à ma connaissance - un peu plus de respect pour l’arbitre et moins d’intention de ruser, mais la philosophie du sport est telle que certaines fautes défensives sont dites “normales”. A haut niveau d’intensité physique, le sport peut sembler brutal voire violent et ce n’est pas étonnant si, comme le montre cette vidéo, les techniques défensives s’apparentent plus à du self-défense qu’à des hippies sportifs. J’insiste sur ce que dit le coach, qui se traduit à peu près par : “en faisant ça il y aura faute, mais c’est pas grave, l’attaque se replace et la défense aussi, l’arbitre ne vous parlera même pas et le jeu peut reprendre”. Non seulement dans cette situation très classique, l’attaque, qui subit la faute, doit reculer pour se replacer, mais la défense, elle, n’est pas plus pénalisée. On est alors en droit de se demander quelle éducation peut découler d’un sport où faire des fautes fait partie du jeu, et encore une fois où l’arbitre est le seul juge. (démarrer la vidéo à 2:49)

https://www.youtube.com/watch?v=z-aHuBM-zI8&feature=youtu.be&t=167


Enfin, au basketball, les fautes sont régulièrement utilisées en fin de match ou de quart-temps pour déstabiliser l’adversaire et l’empêcher de gagner. Lorsqu'un joueur a commis cinq fautes personnelles (six en NBA et WNBA) au cours du match, il est alors remplacé et n'a plus le droit de rejouer jusqu'à la fin du match” . (source : wikipédia) Le sport a même inventé une appellation spécifique pour une faute stratégique : le “hacking”, consistant à faire une faute en fin de jeu sur un joueur moins habile en lancer franc et ainsi récupérer la balle au rebond. Alors que ce sport collectif est indéniablement plein de qualités, je n’arrive pas à m’enlever de la tête cette phrase que nous a dit notre professeur de basketball en 2ème année de licence STAPS, au premier cours théorique de la discipline : “le but du jeu du basket, c’est de gagner, par tous les moyens !” ... ... et de me rappeler la scène d’ouverture du film Le Dernier Samaritain :


Bien entendu, il faut prendre en compte les énormes pressions financières, politiques et sociales qui peuvent être à l’origine de ces “déviances”, transformant le simple plaisir de jouer en un management obnubilé par les résultats. Ceci allié à un manque d’évolution des règles, qui a autorisé trop régulièrement des comportements moralement répréhensibles si l’on se réfère à l’Esprit du Jeu, ou plus communément au Fair-play. L’Ultimate a cette chance de pouvoir apprendre de ses prédécesseurs et s’adapter rapidement afin de garder au maximum l’Esprit qui fait sa particularité.

Reprenons.

Football, handball, basketball, Ultimate, ... il en faut pour tous les goûts et la diversité a son lot de bonnes choses mais la question reste entière : quels enseignements moraux voulons-nous transmettre à nos enfants et comment les différents sports les affectent ?

Sur la question du consentement et bien d’autres, je pense que l’Ultimate a un (grand) pas d’avance au sein du milieu sportif. En donnant la responsabilité aux joueurs dès leur plus jeune âge de faire leurs propres appels à la faute, s’exprimer sur leur ressenti et communiquer autour de ce qui autorisé ou non, j’espère voir grandir des générations d’êtres humains plus à l’écoute et respectueux de leur entourage. Enfin, pour qu’il y ait consentement, il faut avoir le choix ; faire connaître l’Ultimate c’est avant tout donner la possibilité à tous de pouvoir le pratiquer, ou de ne pas le pratiquer en préférant autre chose, car si l’Ultimate a bien un défaut c’est qu’un bon cardio n’est pas donné à tout le monde.


Peace.



 


Merci à vous tous de partager avec moi cette aventure !

Si vous voulez contribuer à ce travail bénévole et me faire un petit cadeau pour m’aider à me développer, n'hésitez pas à me contacter ! 101pourcentultimate@gmail.com

Bisous ! 📷



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